Victime de contrefaçon ? Pensez à la procédure de saisie-contrefaçon
Lorsqu’une société est victime de contrefaçon, cette dernière doit agir vite afin de faire cesser les troubles subis.
Cependant, la preuve de la contrefaçon peut être difficile à rapporter. C’est la raison pour laquelle, la procédure de saisie-contrefaçon peut-être intéressante.
Définition de la saisie-contrefaçon
La saisie-contrefaçon est une mesure probatoire dont l’objectif est de rassembler, en préparation d’une action en contrefaçon, la preuve des actes reprochés.
Plus précisément elle permet au propriétaire de biens intellectuels, c’est-à-dire la personne titulaire d’un droit d’auteur, d’une marque, de dessins ou modèles, ou encore d’un brevet, de recueillir, avant l’action au fond, les éléments de preuves nécessaires au succès de son action.
C’est une mesure qui crée souvent un effet de surprise chez le contrefacteur, car elle s’effectue hors débat contradictoire.
Les conditions de la procédure de saisie-contrefaçon
Pour mettre en œuvre une saisie-contrefaçon, il faut :
- D’une part, être le titulaire actuel du ou des biens intellectuels faisant l’objet de contrefaçon ;
- D’autre part, saisir le tribunal judiciaire compétent d’une requête aux fins de saisie-contrefaçon, afin d’obtenir une ordonnance (c’est-à-dire une autorisation) pour faire pratiquer ladite saisie.
À ce titre, il est important de souligner que cette requête doit être présentée par un avocat inscrit au barreau du ressort du tribunal judiciaire compétent.
Par ailleurs, c’est seulement si le juge est convaincu qu’il existe des raisons de soupçonner une contrefaçon, qu’il rendra une décision favorable en délivrant ladite ordonnance.
L'ordonnance fixe alors, la mission de l'huissier pour faire pratiquer la saisie ou la description.
La procédure de saisie-contrefaçon
➢ La saisie ou la description :
Dès lors, en vertu de l’ordonnance obtenue, il est possible de faire procéder par un huissier "soit à la description détaillée, avec ou sans prélèvement d'échantillons, soit à la saisie réelle des œuvres prétendument contrefaisantes ainsi que de tout document s'y rapportant" (article L. 332-1, article L. 521-4 et article L. 716-4-7 du Code de la propriété intellectuelle).
Également, il est possible pour la juridiction compétente d’ordonner "la description détaillée ou la saisie réelle des matériels et instruments utilisés pour produire ou distribuer illicitement" lesdits biens (alinéa 2 des articles susvisés).
Ainsi, cela peut s’avérer efficace pour mettre fin à la contrefaçon, car elle prive l’entreprise de son outil de production ( il faut bien sûr rapporter la preuve de son intérêt probatoire).
➢ Des exemples de mesure :
“À cet effet, la juridiction peut ordonner :
1° La saisie des exemplaires constituant une reproduction illicite d'une œuvre de l'esprit protégée (... ) ou de tout exemplaire, produit, appareil, dispositif, composant ou moyen portant atteinte aux mesures techniques et aux informations mentionnées, respectivement, aux articles L. 331-5 et L. 331-11 ;
(...)
3° La saisie des recettes provenant de toute reproduction, représentation ou diffusion, par quelque moyen que ce soit, d'une œuvre de l'esprit, effectuée en violation des droits de l'auteur ou provenant d'une atteinte aux mesures techniques et aux informations mentionnées, respectivement, aux articles L. 331-5 et L. 331-11 ;
(...)
La juridiction civile compétente peut également ordonner :
a) La suspension ou la prorogation des représentations ou des exécutions publiques en cours ou déjà annoncées ;
b) La suspension de toute fabrication en cours tendant à la reproduction illicite d'une œuvre ou à la réalisation d'une atteinte aux mesures techniques et aux informations mentionnées, respectivement, aux articles L. 331-5 et L. 331-11” (article L. 332-1 du Code de la propriété intellectuelle).
Focus sur la jurisprudence :
Attention : il est tout de même nécessaire de faire preuve de loyauté lors l’exercice d’une telle procédure.
En effet, dans une affaire récente, les sociétés Puma ont soutenu que la société Carrefour commercialisait une chaussure de tennis reproduisant, sur sa partie latérale, un élément figuratif constituant, selon elles, l’imitation des marques figuratives de leurs vêtements et chaussures.
Dès lors, elles ont obtenu, sur requête, une ordonnance autorisant une saisie-contrefaçon dans les locaux d’un magasin Carrefour.
Cependant, l’arrêt relève que les sociétés Puma se sont abstenues, lors de la présentation de leur requête en saisie-contrefaçon, de faire connaître, d’une part, que la société Carrefour était titulaire de marques françaises et de l’Union européenne portant sur le signe figuratif incriminé, d’autre part, qu’elles-mêmes s’étaient opposées à l’enregistrement de ces marques auprès, respectivement, de l’Institut national de la propriété industrielle et de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle.
Ainsi, il s'en déduit que la partie qui sollicite l’autorisation de faire pratiquer une saisie-contrefaçon doit présenter au soutien de sa requête l’ensemble des faits objectifs de nature à permettre au juge d’appréhender complètement les enjeux du procès en vue duquel lui était demandée cette autorisation et ainsi d’exercer pleinement son pouvoir d’appréciation des circonstances de la cause.
Ainsi, "les sociétés Puma ayant manqué à leur devoir de loyauté à l’occasion de la présentation de la requête, les procès-verbaux de saisie-contrefaçon doivent donc être annulés” ( Cass. Com., 6 décembre 2023, n°22-11.071 ).
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